Un aller-retour vers l’espace au prix de sa santé musculaire

Philippe St-Martin

Étudiant à la maîtrise en sciences de l’activité physique

Un aller-retour vers l’espace au prix de sa santé musculaire

Philippe St-Martin

Étudiant à la maîtrise en sciences de l’activité physique

Au-delà de l’émerveillement pour le domaine spatial se cachent plusieurs défis. Voyager à travers les étoiles a un certain coût, celui de notre santé. L’humanité se rapproche chaque jour de son objectif de conquérir de nouvelles planètes. Avec ce défi costaud, les aventurier·ères de l’espace devront s’exposer à de longues périodes où les muscles seront peu sollicités. En ayant moins recours à l’usage de leurs muscles, les astronautes reviennent de leurs voyages avec des problèmes similaires à nos personnes âgées sur Terre.

La chute d’une pomme a permis à Isaac Newton de proposer une théorie sur la gravité. Cette gravité, qui a attiré la pomme vers le sol, est la même qui oblige Isaac Newton à être fort et musclé. Comme ce grand physicien, vous devez combattre l’effet de la gravité. Depuis votre naissance, votre corps s’est adapté pour y faire face.

La gravité se trouve être un allié de votre santé. En effet, les muscles de nos astronautes, qui s’exposent à l’absence d’effet de gravité, vivent ce que certains chercheur.es ont qualifié de vieillissement accéléré. Éviter le vieillissement à vitesse grand V représente un défi musclé!

Robert Shane Kimbrough, Thomas Pesquet et Peggy Whitson à bord de la Station spatiale internationale 

Crédits : NASA Johnson Space Center

Le défi musclé des vols spatiaux

Le quotidien de l’astronaute ne semble pourtant pas un défi à première vue. Avec l’apesanteur, ils·elles peuvent déplacer de grosses charges sans effort, se déplacer sur plusieurs mètres à la simple poussée d’un pied et dormir sans oreiller. Ce qui a l’apparence d’un rêve pour l’astronaute est pourtant un cauchemar pour le corps.

Le contexte d’apesanteur, caractérisé par un manque de stimulation musculaire, entraîne ce qu’on appelle une décharge musculaire. Cette dernière fait référence à l’absence de force appliquée sur le corps humain. Puisque le corps est bien fait, il s’adapte à son environnement. Mais si l’environnement ne nécessite pas l’usage de muscles et d’une force importante, le corps perd ses acquis. Un corps adapté à l’espace en prend un coup lors d’un retour sur Terre.

Durant le voyage de retour, les astronautes se détachent de l’orbite terrestre pour tomber du ciel. Cet aller simple vers la Terre se fait en quelques heures et ne permet pas une adaptation lente et progressive du corps humain. Cela explique notamment pourquoi les astronautes ont parfois de la difficulté à maintenir les pieds sur terre dans les premières heures après avoir touché notre planète. 

Combattre l’apesanteur

Pour maintenir les astronautes assez en forme et réduire les risques lors du retour sur Terre, l’activité physique fait partie de la solution. Elle vise, notamment, à ralentir le déconditionnement musculaire et s’avère partiellement efficace.

Au cours des prochaines années, l’humain souhaite s’aventurer au-delà d’où il est habitué de mettre les pieds. Lors des futures missions, les astronautes devront s’exposer à de longues périodes sans l’effet de la gravité terrestre. Ces astronautes voyageant pendant plusieurs années, confiné·es dans de petits vaisseaux spatiaux, ne pourront pas avoir recours à de gros appareils d’exercice. Il est actuellement difficile d’identifier l’ampleur du déconditionnement que ces explorateur·trices de l’espace vivront, mais nous pouvons être certain·es que la prescription d’activité physique devra être adaptée si l’on veut atteindre la planète rouge en santé. Les contre-mesures jusqu’à présent efficaces pour maintenir la santé musculaire risquent de s’avérer insuffisantes pour les vols spatiaux dans l’espace lointain. Ainsi, the sky is the limit n’est plus d’actualité lorsqu’il s’agit des défis en santé auxquels les spécialistes devront faire face.  

Mieux comprendre le vieillissement musculaire en se maintenant au lit

La perte de la masse musculaire et de la force n’est pas un phénomène unique à celui des astronautes. Avec l’avancée en âge, un déconditionnement progressif est attendu, mais il peut toutefois être accéléré lors d’un alitement prolongé, tel qu’une hospitalisation.  D’ailleurs, un des principaux modèles utilisés sur Terre pour simuler l’apesanteur est de rester au lit. Sa particularité : la tête du lit est légèrement plus basse que le pied. Dans cette position, le participant vit une décharge musculaire similaire à celle d’un astronaute. C’est donc dire que de rester immobile au lit accélère le déconditionnement musculaire!

Participant de recherche alité dans un analogue à la microgravité

Crédits : Agence spatiale allemande (DLR)

Maintenant que nous savons que le vieillissement accéléré que vivent nos astronautes n’est pas si loin de la réalité d’une personne alitée, la solution pour préserver l’autonomie est peut-être la même, soit l’activité physique encadrée! 

 

Ce que font les astronautes pour maintenir leur santé physique et mentale n’est donc pas un secret exclusif au domaine spatial. L’activité physique est une façon de stimuler ses muscles et maintenir ses acquis. Vos prouesses sportives ne vous mèneront peut-être pas au travers des étoiles, mais elles vous aideront certainement à atteindre de nouveaux sommets. Il ne vous reste qu’à identifier des activités vous permettant de combattre l’effet de la gravité afin d’éviter de vieillir de façon accélérée. Le petit pas que vous ferez sera certainement un grand pas pour votre santé!

L’astronaute canadien David Saint-Jacques maintenant ses muscles actifs en vue de son retour sur Terre

Crédits : Agence spatiale Canadienne (ASC)

Découvre l'auteur

Philippe St-Martin

Philippe St-Martin est étudiant à la maîtrise en sciences de l’activité physique à l'Université de Sherbrooke. Désirant faire partie de la prochaine génération de professionnels en aérospatiale au Canada, il s’intéresse au déconditionnement musculaire en contexte d'apesanteur dans l’optique d’optimiser les entraînements physiques des astronautes pour les missions spatiales de longues durées.

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